Le Théâtre et ses « genres »
Théâtre de Rue / de tréteaux
Spectacles déambulatoires et Commedia dell’Arte
Comme son nom l’indique, le théâtre de rue a lieu en plein air, dans un espace public, que ce soit à même le bitume ou perché sur une structure en bois appelée tréteaux, pour une meilleure visibilité des spectateurs. Il est par essence itinérant, ce qui signifie qu’il se déplace de places en places, de villes en villes, dans la tradition foraine. Il se nourrit de l’ambiance générale dans le public et se pratique souvent dans le cadre de Festivals de plus ou moins grande envergure comme les Rencontres d’Ici et d’ailleurs (à Noisy-le-Sec) ou Onze Bouge (dans le XIème arrondissement de Paris) à la période printanière, le Festival d’Aurillac, Châlon-dans-la-rue ou lors du Festival Itinérant des Arènes de Montmartre l’été ou à la rentrée, comme par exemple lors de Parades à Nanterre, Cergy, Soit ! et La Défense Tour Circus (pour des raisons météorologiques évidentes). Certaines compagnies sont spécialisées dans le théâtre de rue, chacune ayant ses spécificités propres : la compagnie nantaise Royal de Luxe, la compagnie Opposito, les 26000 Couverts ou bien encore la troupe historique des Tréteaux de France aujourd’hui dirigée par Robin Renucci.
A l’origine le théâtre de tréteaux est né sur les places publiques. Au Moyen-Age, il s’agit d’un théâtre religieux, les Mystères, ou la représentation de scènes issues des écritures saintes, puis au XVIIème siècle, il s’affranchit de l’église et devient pur divertissement. Au XIXème siècle, il se développe dans les foires, notamment sur le fameux Boulevard du Crime, surnommé ainsi (il s’agit en réalité du Boulevard du Temple) en raisons des nombreux crimes qui étaient représentés chaque soir dans les mélodrames, comme on peut en voir une excellente illustration dans le célèbre et sublime film de Marcel Carné Les Enfants du Paradis. Les spectacles y prenaient différentes formes, plus ou moins sophistiquée. Saltimbanques et bonimenteurs, montreurs d’ours et charlatan, mime et Commedia dell’Arte faisaient le sel des passants prompts à se laisser embobiner ou à se distraire.
De nos jours, le théâtre de rue existe toujours. Certaines compagnies comme le Mystère Bouffe ou la compagnie Tutti Quanti, ou certains metteurs en scène comme Carlo Boso, prolongent la tradition de la commedia dell’arte, qui, comme son nom l’indique, nous vient tout droit d’Italie. Il s’agit d’une forme de théâtre populaire comique voire bouffon dans lequel les comédiens portent masques et costumes à l’origine carnavalesques et interprètent des personnages archétypaux. Le genre a même un lieu qui lui est dédié à Paris, la Comédie Italienne (rue de la Gaîté) dirigée par Attilio Maggiulli. Plus innovantes, d’autres compagnies se produisent sous la forme de parades festives que le public est amené à accompagner, la compagnie Royal de Luxe étant la plus célèbre dans ce domaine avec ses marionnettes géantes et ses constructions pharaoniques entièrement articulées. D’autres, comme les 26000 couverts, inventent et réinventent des cabarets foutraques où le loufoque et le rocambolesque sont rois. D’autres encore, comme Annibal et ses éléphants dont la devise « Un théâtre partout, un théâtre pour tous » résume bien la démarche, investissent cours d’écoles ou de prisons, villes et campagne, inaugurations municipales en tous genres ou shows télévisés, avec des spectacles aux inspirations multiples mais aussi des interventions atypiques comme, entre autres, la BIP BIP (« Brigade d'Intervention poétique briseuse d'idées plates »).
Intervenant dans l’espace public, le théâtre de rue fait partie de ces initiatives artistiques qui permettent d’investir la ville autrement, d’envisager sous un jour nouveau le tissu urbain et l’action culturelle de proximité. Il permet également, lors de ses évènements ponctuels, de générer un engouement collectif convivial et bon enfant, un temps de partage et de découverte pour tous, faisant fi des classes sociales et autres disparités. Il s’agit le plus souvent de spectacles à apprécier en famille, adaptés aux enfants autant qu’aux parents, et la plupart du temps accessibles gratuitement.
Ainsi, le théâtre de rue rejoint ses origines festives et populaires.