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Le Gang of Witches met le feu au YOYO pour envoyer valser le patriarcat dans les flammes de l’enfer
Gang of Witches, troisième ! Après deux éditions qui marquaient la naissance et l’entrée en matière du collectif, le nouveau coup d’éclat du gang artistique, féministe et écologiste aura lieu au YOYO, l’espace club du Palais de Tokyo, le week-end du 15 et 16 juin et prendra la forme d’un festival qui s’annonce fort et sans concession.
Si vous en êtes encore à penser que les sorcières chevauchent des balais, la tête coiffée d’un chapeau pointu, une verrue big size sur le nez, vous vous fourrez le doigt dans l’œil, excusez l’expression. Longtemps chassée avec conviction pour être placée sur un bûcher en guise de contre-exemple à la bien-pensance, la bienséance, au droit chemin quoi, la sorcière a toujours été le bouc émissaire parfait d’une société lisse et polie, érigeant sa morale et sa religion en valeurs suprêmes. Bien sûr, il est loin le temps de l’inquisition, de l’eau a coulé sous les ponts depuis le Moyen-Age et la sorcière s’est déparée de son odeur de souffre pour muter gentiment en figure indispensable de la littérature enfantine, une créature de conte façonnée pour cristalliser les peurs primaires avant le bisou du soir, celle qui jette des mauvais sorts derrière son sourire édenté, le pendant féminin du loup qui dévore. Et pourtant. Les sorcières n’ont pas dit leur dernier mot, elles ont d’ailleurs repris du galon récemment depuis la parution de l’essai de Mona Chollet (“Sorcières. La puissance invaincue des femmes”) qui remet les pendules de l’Histoire à l’heure. Les sorcières sont désormais des femmes d’aujourd’hui, des vraies, pas des hologrammes à réclame, qui encore et toujours sortent du moule, échappent aux diktats, sèment le trouble. Les sorcières sont les affranchies des temps modernes, elles mènent leur barque à contre-courant sans se soucier du qu’en dira-t-on, farouchement libres, elles tiennent le gouvernail de leur vie à pleines mains et rien ni personne n’est en mesure de leur barrer le chemin.
C’est donc sous le signe de cette icône féministe universelle que Paola Hivelin, directrice artistique du gang et plasticienne fascinante, accompagnée de Sophie Rokh, à la direction musicale des opérations, chanteuse, musicienne et écrivain par ailleurs, a créé le collectif en 2016, avec l’envie de façonner un espace non seulement de création mais également d’échanges et de réflexions en dehors des contraintes habituelles de production, une plateforme qui place l’art et l’engagement au centre de son ADN. Un projet amené à se développer sur neuf années consécutives, chacune étant liée à une planète (Mars cette fois, archétype masculin et dieu de la guerre chez les Romains), pour mieux s’ancrer dans une dimension cosmique qui permet de repenser nos actions terrestres, notre héritage et nos influences, en prenant de la hauteur. Issues de domaines artistiques différents, mues par des convictions éthiques, écologiques et politiques allant dans le même sens, se méfiant des idées reçues et des carcans faciles, le caractère bien trempé dans l’encre noire de la nuit, Paola Hivelin et Sophie Rokh ont d’une voix commune choisi de se positionner via un militantisme artistique qui prend sa source dans l’aura des étoiles et des mythologies ancestrales, de la nature et des liens invisibles qui nous enlacent, du sacré et du profane, du mystère et de la matière, de la magie du geste qui invente et crée sans cesse. Pour qu’il y ait quelque chose plutôt que rien. Quelque chose de grand, beau et fort pour donner tort à tous ceux qui restent dans leur coin à ronger leur frein. Et que la lumière naisse de la nuit, encore.
Voici donc le troisième opus de l’événement annuel que concocte le gang avec une variante cette année puisque le format mute, passant d’une exposition sur la durée à un week-end ramassé en festival avec projection de film, concert et performances qui viennent rythmer l’exposition collective organisée. Pour la qualité et la puissance des œuvres exposées et des artistes invités, on fait confiance à Paola Hivelin si l’on en croit les deux précédentes éditions, repère de regards et de gestes forts, marquants, voire carrément bouleversants. Cette année, place à Sunny Buick, Vivien Bertin, Sabrine Kasbaoui, Scarlett Coten, Arôm, S.O.A.P, Miikka Lommi, Amélie Poulain, Julie Atlas Muz, Ciou, Mina Mond, Emilie Jouvet, Mélanie Martinez Llense, Louis(e) de Ville, Rébecca Chaillon et Son of a Pitch. On ne vous les présente pas tous et toutes en détail sinon on va y passer la nuit mais franchement la touche vintage de la tatoueuse Sunny Buick vaut son pesant de couleurs pop, les photos de Vivien Bertin sont des caresses pour la rétine, la peinture fourmillante de détails de Mina Mond est une plongée métaphysique abyssale, les performances de Julie Atlas Muz déjouent les codes du strip-tease et de la danse pour explorer des territoires troubles et envoûtants, les toiles de Ciou exhalent leurs figures féminines toujours reliées au monde animal et végétal. Quant aux peintures-sculptures de Paola Hivelin, scintillantes et ombragées, elles se métamorphosent ici en masques ensorcelants, hommages aux femmes qui osent braver les injustices et élever leur voix au-dessus des silences assassins.
Comme chaque année, l’événement s’accompagne de la sortie d’un livre d’art en édition limitée et d’un album concocté par Sophie Rokh, dont le titre phare, “Patriarchy is burning” (assorti d’un clip diffusé sur place, réalisé par Miikka Lommi) résonne comme un manifeste, un mix entre chant lyrique et hip-hop pour poser les bases d’un nouveau monde et fouler aux pieds l’ancien.
Les 15 et 16 juin, le YOYO se fait foyer de résistance, bûcher du patriarcat et de tout système oppressif pour fêter les libertés individuelles et collectives, le droit à la différence et la joie du mélange des genres. En entrée libre, bien évidemment !
Par (la sorcière) Marie Plantin
Gang of Witches
Patriarchy is burning
Les 15 & 16 juin 2019
Au YOYO
Palais de Tokyo
13 Avenue du Président Wilson
75016 Paris
Entrée libre